À propos

Biographie

Après des études à l'École supérieure d'Art et de Design Marseille-Méditérranée (INSEAMM), Karine se forme à la tapisserie d'ameublement où elle se passionne pour le textile. Elle commence alors son apprentissage de tisserande autodidacte en 2014, avant de se décider, en 2017, à concevoir ses propres textiles sous forme de vêtements.
Cette même année, son premier vêtement mural « Cérémonie lunaire » - inspiré du Kimono traditionnel - est récompensé par le Prix création de la région Bretagne des Métiers d’art. Aujourd’hui, c’est dans son atelier basé en Bretagne, qu’elle exerce.

Démarche artistique

Karine N’guyen Van Tham a toujours conçu ses œuvres textiles comme des objets d’héritages et de transmission.

Cette vision est née de souvenirs d’enfance ; Où elle voit les soins accordés aux vêtements de ceux qui furent aimés.

De ceux qui les ont quittés.

Elle se souvient de cet objet qui entend les vivants parler, reçoit les caresses et les larmes versées.

Elle se souvient de cette difficulté à s’en séparer et de ceux, impossibles de déplacer.

Karine a compris, très jeune, le pouvoir de trait d’union de cet élément, indissociable de l'Homme, qui devient une prolongation de l'être.

Elle voit dans l’objet textile une relique empreinte du vivant, d’odeurs, de postures et d'émotions.

Vestige d’un autre temps, seul témoin d’un passé oublié, d’un fragment de vie tombé dans l’oubli.

Un fragment de vie qu’elle s’attache à raconter à travers un dialogue subtil entre l'émotion et la matière que l'artiste entretient et qui se matérialise entre ses mains ; Karine ressent, écrit, tisse, plonge ses mains dans les couleurs végétales, brode, use, sculpte et met en forme.

Marquée par cet objet de lien, nécessaire à la mémoire des siens, elle n’a de cesse que de créer ces "supports d’âmes" à investir, à côtoyer ou à ne jamais quitter.

Et c’est à travers eux qu’elle interroge les émotions des vivants face à la perte et à l’inéluctable, mais aussi, face à la découverte parfois bouleversante d'éclats de vies marqués par l’Histoire ou le tumulte de la vie elle-même.

Karine tisse des liens entre Passé et Présent et met en lumière notre propre relation à l'Histoire, au temps et à leur caractère d'impermanence.

Elle aborde cette relation à travers le prisme de la poésie ; un monde, un langage fragile, qui nous offre un autre angle, d'autres perspectives sur des sujets qui lui sont chers tels que le deuil, la mémoire, la solitude.

Sa poésie lève le voile avec pudeur sur ces thèmes inhérents à l'histoire de l'Homme dans toute sa beauté comme dans sa difficulté. Et dans cette intimité révélée à l'autre, elle livre un espace commun d'apaisement qui invite à la contemplation et au recueillement car sans nul doute, " La poésie crée un monde habitable avec autrui et pour autrui." Stéphane Mallarmé.

Au fil de son parcours créatif, la vision de Karine pour l’objet textile s’est élargie. Aujourd’hui, elle voit plus loin que le rapport entre l’Homme et le textile.

Elle voit plus grand et aborde cet élément comme devenant un « objet frontière », à la lisière entre deux mondes, en lien constant entre l’Homme et son environnement.

Un environnement qui laisse des traces et que l’objet textile absorbe au même titre que nos postures et émotions.

Karine part alors à la conquête de nouveaux territoires, du territoire en lui-même et se met à questionner, faire dialoguer les rapports qui existent entre l’Homme, son environnement et l’objet textile.

Ce lien profond, tissé entre ces trois essences, Karine aime l’explorer et le faire vivre à travers l’installation de ses œuvres dans leur milieu naturel pour les voir se modifier, dialoguer, s’imprégner des éléments ou tout simplement y raconter leurs histoires.

Elle va, avec subtilité jouer entre Présence et Absence au sein de ses installations ou de l’objet textile en lui-même ; là où l’Homme n’apparaît physiquement jamais, là où l’environnement se meut sans cesse, ce sont leurs traces, figées dans la matière, qui parlent pour eux.

L'objet textile est au centre d'un questionnement toujours en mouvement : Comment évolue-t-il, se modifie-t-il sous l'influence de l'Homme, du paysage ? Comment s'influencent-ils ? Et si elle prête une conscience à cet "Objet frontière", que pourrait-il alors nous raconter ? Quelle vision, quel monde aurait-il à nous offrir ?

L'artiste œuvre à raconter les Hommes, faire parler le paysage et prête une conscience poétique à la matière.

Elle ressent chaque œuvre comme Vivante et intrinsèquement liée à un tout ; passant sans cesse d’un microcosme à un macrocosme, ses œuvres singulières, qui nous racontent un fragment d’Histoire, résonnent au plus profond de chacun d’entre-nous. Car finalement, au sein de chaque œuvre, ne serait-ce pas une infime part de l’Humanité qui jaillit ?

Références et inspirations

Les inspirations et références de Karine se veulent variées, et parfois, un seul détail suffit.

Tout comme Germaine Richier (Sculptrice Française) - dont elle admire la liberté du geste, le travail de cisaillement des couches de glaises et la recherche du vivant dans des formes déchiquetées - Elle va dans un premier temps glaner ses inspirations dans son environnement, qu’il soit celui dans lequel elle vit ou celui dans lequel elle ne fait que passer, car c’est bien la contemplation de ce dernier, vivant, qui crée le premier terreau de son imaginaire.

Sans jamais se focaliser sur un ou une artiste en particulier, elle va tantôt puiser dans les formes aussi puissantes qu’abstraites d’Ursula Von Rydingsvard (Sculptrice Allemande) - où la force du geste se mêle à celle de la nature - que dans les œuvres poignantes de Berlinde de Bruyckere (Artiste Belge) et tout particulièrement, dans son illustration de la vulnérabilité à travers le traitement d’objets de lieux de vie tels que des couvertures, matelas, lit.

Elle va s’attarder et observer méticuleusement un objet empaqueté par Christo et Jeanne Claude (Artistes contemporains) qui traduit un langage, une histoire du geste et devient acte de transformation ; passant alors de l’objet fonctionnel à la sculpture, du profane au sacré.

Dans son approche de la couleur et du textile, elle va trouver résonance dans les Abakans de Magdalena Abakanowicz (Sculptrice Polonaise) où l’utilisation des fibres et couleurs végétales aux teintes terreuses la renvoient inévitablement à la force de son environnement, cet humus créatif.

Dans son travail autour de la mémoire, du vêtement et de la présence, c’est l’installation "Personne" de Christian Boltanski (Artiste Français) au Grand palais pour l’événement "Monumenta" en 2010 qui fait partie de ses références les plus notables.

L’œil se pose, la sensibilité s’aiguise. Il suffit pour Karine d’observer le traitement de la lumière de la nuit par Willy Kriegel (peintre allemand) dans son tableau "La nuit", 1943 ou par Hermann David Salomon Corrodi (peintre Italien) dans "Promenade nocturne des moines au Mont Athos", 1905 pour faire jaillir des émotions qui se traduiront en vers et en matière.

Il lui faut s’attarder sur la vie et la vision de personnages qui ont façonnés l’Histoire tels que Gengis Khan (Grand Khan de l’empire Mongol, 1162-1227), Kubilai Khan (Empereur de Chine, 1215-1295) et Marco Polo (Explorateur et Marchand Vénitien, 1254-1324) pour y puiser force et philosophie de vie qui deviendront des références au-delà même du champ artistique.

Les inspirations de Karine vont de pair avec une sensibilité accrue à l’Homme, son parcours, son Histoire. C’est dans ce long sillon qu’elle s’attache à s’inspirer des différents aspects de la condition humaine comme la guerre, l’esclavage ou la résilience ainsi que d’un minimalisme de vie porté par des Hommes de temps immémoriaux qui perpétuent des traditions où une recherche plus grande que leurs propres conditions, tels que les transhumants, les pèlerins ou les ermites.

L'Atelier

La dimension sacrée de ses œuvres prend racine dans son atelier où la notion de temps se perd et disparaît. Où les techniques artisanales et personnelles lui permettent de conscientiser profondément le fragment de vie à révéler : Écriture à la plume, tissages des textiles et rubans sur métiers à tisser, teintures végétales, cuves indigo, coutures à la main, broderies d'écailles de pommes de pin, piquage des laines, sculpture à l’aiguille et usures au rythme des saisons. Autant de techniques que de langages que Karine développe au sein de ses œuvres, dans son environnement breton.